J 351 à 356 : Ile de Pâques – Rapa Nui

Recevoir un cadeau fait toujours plaisir, mais il faut avouer qu’au-delà du geste, le cadeau en lui-même a quand même son importance. Celui-là on n’est pas prêt de l’oublier, car c’est grâce à la grande générosité de nos familles et de nos amis que nous avons pu passer 5 jours hors du temps, perdus au milieu du Pacifique.

Bout de terre au milieu des flots

Se rendre sur l’île de Pâques, Rapa Nui en langue originelle pascuane, c’est déjà une expérience particulière. Une fois Valparaiso et la côte du Chili survolés c’est l’océan qui défile pendant 4h sous l’avion. Au moment d’atterrir, mieux vaut faire confiance au pilote, car  il n’y a pas de rab sur la piste d’atterrissage qui occupe toute la largeur de l’île.

Nous voilà sur l’une des terres les plus isolées de la planète, à 3500 km des côtes chiliennes et 2000 km de la première trace de civilisation… C’est à Hanga Roa, principal village de l’île où vit la quasi-totalité de la population locale (env. 8000 habitants sur toute l’île), que nous posons nos sacs.

Easter Island Hanga roaIle de paques_Cimetiere

Le relief de l’île est assez varié, plutôt boisé au Sud, quelques cultures au centre, des côtes rocheuses et désertiques qui rappellent l’Irlande ou la Bretagne et même une palmeraie qui borde la seule plage de sable au Nord de l’île.

Ile de paques_Cote Rapa_Nui_Volcan Rano KauIle de paques_Anakena

 

Les Moaïs

L’ensemble de l’île, classée au patrimoine mondial de l’Unesco, est couvert par le statut de parc national, ce qui s’explique par le fait qu’environ 800 Moais, ces fameux monolithes anthropomorphes gigantesques, sont disséminées un peu partout sur ce petit bout de terre de 160 km² et 23 km de long dans sa plus grande dimension.

Ile de paques_sunrise

A pied, en voiture ou en vélo en fonction de leur éloignement du village, nous sommes partis sur l’unique route qui fait le tour de l’île, à la découverte des principaux sites, pour tenter de percer le mystère de ces grands hommes de pierre.

Pouvant mesurer jusqu’à 10 mètres de haut, pour ceux qui sont sortis de la carrière, ils reposent sur un socle en pierre appelé Ahu et sont parfois coiffés d’un Pukao, bloc de pierre rouge de plusieurs tonnes, à la signification discutée. Les Moaïs représentent les ancêtres protecteurs de chaque tribu « matamuta » qui peuplaient initialement l’île, par conséquent lors des guerres entre les clans, ces statues étaient écroulées face contre terre, ce qui explique qu’il y ait peu de Moaïs encore debout aujourd’hui. Nombreux sont ces géants qui gisent aujourd’hui, le visage contre le sol pour l’éternité, un spectacle qui dégage une sensation toute particulière.

Rapa_Nui_Portrait

Rapa Nui (2) Ile de paques_tongariki (2)

A l’exception des 7 Moaïs du site d’Ahu Akivi, qui représentent les ancêtres polynésiens qui découvrirent l’île, toutes les statues sont tournées vers les terres, dos à la mer.

Ile de paques_Ahu AkiviIle de paques_sunset

 Rano Raraku : La fabrique de Moais

C’est sur les flancs du volcan Rano Raraku que se trouve la carrière principale dans laquelle furent taillés la plupart des Moaïs entre le 13ème et 15eme siècle, avant que le culte des ancêtres incarnés par les Moaïs soit remplacé par de nouvelles pratiques.

C’est sans aucun doute le site le plus impressionnant de l’île, formé par une colline verdoyante de laquelle émergent des dizaines de bustes en pierre, gigantesques. Un sentier aménagé serpente sur le flanc de la colline pour permettre aux visiteurs d’approcher au plus près des statues. En haut de la carrière, des Moaïs inachevés sont encore prisonniers de la roche. Comme si les ouvriers/artisans avaient fui le site précipitamment et que le site était resté figé. L’un d’entre eux mesure plus de 20m de long. Il aurait sans doute été impossible de le déplacer s’il avait été terminé. Des études ont estimé à 10 à 15 mois le temps nécessaire à la taille d’un Moaï de taille moyenne.

Ile de paques_Visage Ile de paques_Rano Raraku Ile de paques_Rano Raraku (2) Ile de paques_Moai Enfoui Ile de paques_Carriere

Les moais étaient probablement acheminés sur leur lieu de destination à l’aide de rondins de bois posés au sol à l’horizontale avant d’être dressés sur place à l’aide de  rampes de pierres ajoutées petit à petit pour incliner la statue jusqu’à la position verticale avec leur « Pukao » déjà en place sur leur tête.

Certaines théories imaginent qu’ils pouvaient être redressés à la carrière avant d’être acheminés à laide de corde selon un mouvement de glissement de droite à gauche par petites avancées.  Une fois en place, les Moais étaient alors « réveillés » en plaçant leurs yeux faits de corail blancs et pierre rouge.

Rapa_Nui_Moai Corail

Contes et Légendes de Rapa Nui

Peuplement de Rapa Nui :

Plus encore que la technique mise en œuvre pour créer les Moaïs, souvent source d’hypothèses farfelues pour expliquer le déplacement des ces tonnes de pierre à la simple force de l’homme, c’est l’origine du peuplement de ce petit caillou au milieu de l’océan qui reste encore aujourd’hui incertaine et qui donne lieu à de nombreux scénarios.

Explorateurs polynésiens :

La théorie la plus largement relayée est celle d’un peuplement par des tribus polynésiennes entre 800 et 1200 de notre ère. La légende raconte que sept explorateurs polynésiens appartenant chacun à un clan partirent sur une grande pirogue à la recherche d’une île propice à l’installation d’une nouvelle communauté. Ce sont ces sept navigateurs qui sont représentés par l’Ahu Akivi, les seuls Moaïs tournés vers l’océan et non vers les terres.

Influence Inca :

Une autre théorie envisage un peuplement, au moins partiel, par des peuples d’Amérique du sud et notamment les Incas. Cette théorie s’appuie, entre autre, sur la présence de Totora sur l’île, ces mêmes roseaux que l’on trouve sur le lac Titicaca entre le Pérou et la Bolivie. On en trouve au cœur du cratère de Rano kau. Les visages des moais présenteraient des caractéristiques du peuple incas : Nez effilé, bouche fine, mâchoire dessinées, grandes oreilles…

Rapa_Nui_Rano Kau

La technique de taille de la pierre abonde également dans le sens d’une influence des incas. Il est vrai que certains assemblages de blocs ressemblent de manière troublante aux assemblages que l’on a pu observer au Machu Pichu.

Rapa_Nui_assemblage Inca

Rite de l’homme Oiseau :

Au Sud de l’île se trouve l’ancien village cultuel d’Orongo. Ce rituel serait apparu dans la période de décadence des Moaïs. Les différentes tribus se retrouvaient ici pour élire l’homme-oiseau, qui deviendrait le chef de l’île.  Chaque chef de tribu ou son représentant partait à la nage sur un frêle radeau en totora chercher sur une petite île à 500 mètres au large, le premier œuf des frégates, ces grands oiseaux noirs au cou rouge. Il devait alors le rapporter au village en le sanglant sur son front pour pouvoir nager et escalader les 300 mètres de falaise le séparant du sommet. Le premier à ramener l’œuf intact assurait le pouvoir à sa tribu. De nombreuses représentations rupestres évoquent ce culte de l’homme oiseau.

Au sommet de la falaise des abris en pierres sèches et au toit de terre ont été restaurés. Ces habitats qui n’étaient utilisé qu’en période de cérémonie n’avaient que de toutes petites ouvertures vers l’extérieur pour pouvoir se protéger du vent et d’éventuelles attaques des clans adverses.

Rapa_Nui_Orongo village Rapa_Nui_Orongo

Après 5jours sur place, nous repartons pour Santiago, encore fascinés par cette culture mythique. Quand l’avion du retour décolle nous regardons l’île s’éloigner par le hublot en se disant que nous ne reviendrons probablement jamais. C’est une sensation bizarre mais nous sommes heureux d’avoir eu la chance de découvrir cette terre chargée d’histoire.

Rapa_Nui_Avion

Il est maintenant temps de remettre le cap vers le Sud….

C&W.