Rencontre avec Bruce W. Davis à Albuquerque, Nouveau Mexique

Présentation

Bruce W.Davis est un architecte américain. Il s’est installé dans la région du Nouveau Mexique en 1973, une période où l’engouement pour la construction solaire passive et en adobe avait déjà débuté. De nombreux architectes commençaient à s’intéresser à ce qui avait été construit à travers les siècles dans cette région, par les indiens pueblos d’une part et les colons espagnols d’autre part, toujours dans une prise en compte sensible de l’impact du soleil sur l’architecture. Au nouveau Mexique à cette époque, il y avait les pionniers de cette nouvelle architecture solaire passive  dont le mouvement avait débuté dans les années 1940, comme l’architecte  Peter Van Dresser , qui construisit des maisons solaires actives compactes, l’architecte William Lumpkins, un des pionniers de la construction passive solaire en adobe, ou encore John Gromim  qui dessinait déjà une maison solaire passive pour un concours en 1947.

C’est dans ce contexte que Bruce est venu s’installer dans la région. En 1975, il conçoit sa première maison familiale solaire passive. Dans ce contexte innovant et expérimental, Bruce se crée un réseau d’acteurs engagés dans ce mouvement, comme Steve Bear, fondateur de Zomeworks et initiateur d’un des premiers éveil écologique américain avec sa ville expérimentale « Drop City », fondée dans les années 70, à la recherche d’une sobriété énergétique. C’est à ce moment qu’il rencontre l’architecte qui deviendra son associée sur de nombreux projets phares, Karen Terry.

Sa carrière s’inscrit ainsi dans une recherche permanente à la fois sur la conception solaire passive ainsi que sur l’utilisation du matériau terre crue.

Son travail

Sur certains de ses projets, Bruce travaille en collaboration avec l’entreprise Zomeworks et son fondateur Steve Baer, précurseur dans les technologies en énergie solaire, qui développe des les années 70 des recherches et expérimentations technologiques dans le domaine du solaire passif . Dans les années 80, il conçoit des projets basés sur des stratégies simples de solaire passif , souvent organisés autour d’atrium, en mettant en œuvre des innovations de l’époque comme des chauffe-eau solaire, des systèmes de plafond avec ouvertures asservies à la température. Les murs en adobe font partie intégrante de son design et participent à l’efficacité énergétique des bâtiments qu’il conçoit. Il travaille avec la matière de ce matériau en imaginant des systèmes de murs Trombe en briques d’adobe ou en pisé (terre compactée), laissant la matière apparente, comme un tableau sculpté, derrière les grandes baies vitrées.

Lorsqu’il conçoit un projet en structure légère, il ajoute des murs en adobe à l’intérieur pour augmenter la masse thermique de l’édifice. Si ce n’est pas avec le matériau terre, Bruce utilise alors de l’eau..

Avec Karen Terry, ils ont conçu un projet de maison compacte et légère, démontable facilement en utilisant l’invention de Zomework, le DrumWall. Ce système avait été expérimenté par Steve Baer dans ses projets de « Zomes » développés dans son projet de « Drop City », à base de bidon d’eau réutilisés.

Ainsi, ces réservoirs d’eau verticaux en PVC alignés devant des ouvertures en façades, peints en noir côté extérieur et blanc à l’intérieur, permettent d’emmagasiner de la chaleur solaire pour la rediffuser lentement au cours de la journée et de la nuit. Ce système propose une solution à moindre coût, qui permet d’être facilement démontable et transportable.

Durant notre interview, Bruce évoque sa philosophie de travail :

  « Ma manière d’étudier le design et la construction et de rechercher des solutions passe par la création de formes et de structures que l’on pourrait qualifier d’avantage d’art que d’architecture. Il y a une réelle complexité qui ressort de ce que l’on appelle le « solar design » , entre la recherche de la forme idéale, cubique ou sphérique, qui a tant influencé l’architecture classique mais aussi en ingénierie, et les forces avec lesquels ont doit composer comme le vent, la pluie ou le soleil qui sont tout sauf géométriques. Il s’agit alors de concevoir des objets qui respectent à la fois une certaine sorte de formalité, à la fois esthétiquement et techniquement (…), tout en prenant en compte les éléments qui l’entourent. »

 « Pour être capable de concevoir un édifice qui répond à toute la complexité de ce que peut être un bâtiment moderne, en prenant en compte les évolutions climatiques, il suffit de voir le bâtiment comme quelque chose de bien plus complexe que simplement un squelette et une peau.(…) Les édifices ont comme des systèmes nerveux.(…) Les choses peuvent être conçues efficacement de la manière la plus simple qu’il soit, sans utiliser les complexités technologiques mises en œuvre aujourd’hui dans les maisons « passiv’ house » européennes, qui utilisent finalement des systèmes « actifs » . J’ai des doutes énormes sur les vertus d’un édifice conçu avec ces systèmes technologiques voués à être obsolètes en l’espace de quelques années. »

Quelques projets

Certains de ses projets ont été publiés à plusieurs reprises dans les années 80. Au-delà des innovations techniques et de la conception exemplaire en matière d’orientation, de choix des matériaux et de fonctionnement du bâtiment, ces projets conservent aujourd’hui un style résolument contemporain et ont été republiés 18 ans après leur construction.

Sa propre maison : Compacte, low-coast et solaire passive

Avec ses murs Trombe sur la façade principale orientée plein sud et sa forme compacte, sa maison approche un bilan neutre en énergie pour le chauffage et la climatisation.

Maison compacte : Mur de masse thermique en colonnes d’eau

C .