La Région de Four Corners : Découverte de la culture des anciens Pueblos, évolution et organisation de l’habitat

Lors de notre passage dans la région dite des « four corners » nous avons pu étudier les constructions des anciens pueblos, ancêtres des Indiens Hopis qui peuplèrent ce territoire entre les années 400 et 1300.

A travers les sites que nous avons découverts (Mesa Verde, Navajo National Monument, Aztec ruins et Chaco Canyon), nous avons étudié les différentes techniques constructives utilisées par ce peuple qui bâtissait en terre crue puis en pierre sèche. L’évolution de ces techniques au cours du temps est allée de pair avec l’évolution de la forme de leur habitat et de leurs lieux spirituels.

Parce que nous sommes convaincus que les bâtisseurs d’hier faisaient preuve de génie dans leur conception, dans le respect de leur environnement et de ses ressources, il nous semble intéressant de retranscrire ici les grandes lignes de leurs pratiques ancestrales.

Les premières huttes semi-enterrées

Dans les années 400, les indiens Anasazis, anciens puebloans, commencent à construire les premiers abris semi-enterrés sur les plateaux des « messas » et à l’abri des falaises sous des arches naturelles formées dans le grès. Ces premiers habitats sont appelées maisons puit (pithouse) car le sol était excavé sur une cinquantaine de centimètres, selon un plan en forme de « trou de serrure ». Une structure légère en branchage formait l’abri, de forme carrée. Ces constructions étaient constituées d’une pièce principale, à laquelle venait s’ajouter un espace de stockage des denrées et servaient vraisemblablement à la fois d’habitat et de lieu de cérémonie. L’abri était accessible par le toit, duquel on descendait à l’intérieur de la pièce par une échelle.

Evolution de la forme de l’habitat

Les maisons puits évoluèrent en deux formes distinctes, l’habitat et les lieux dédiés aux cérémonies, appelées « kivas ». Aux alentours des années 850, la plupart des indiens vivaient dans des constructions exclusivement dédiées à l’habitation, et utilisaient des constructions distinctes pour les cérémonies. L’évolution de l’habitat s’est faite hors du sol pour aboutir à des maisons de plain-pied, alors que les lieux de cérémonie se sont peu à peu enterrées pour devenir ce que l’on appelle des pièces puits (pitroom) avant d’arriver à un modèle complètement sous-terrain appelé « kiva ». Si l’on tente de traduire l’évolution des formes de construction indiennes, la vie quotidienne serait en quelque sorte tournée vers le ciel et le soleil alors que les cérémonies religieuses s’orientent vers la terre. Cette évolution des constructions est liée aux croyances indiennes, selon lesquelles l’origine de l’homme se trouverait au centre de la terre.

Maisons en bois et terre et premiers « pueblos »

Ces maisons de plain-pied étaient d’abord conçues en structure légère, utilisant à la fois le bois et la terre. Ces habitats hors sols se sont peu à peu accolés les uns aux autres, pour s’organiser en villages, ce qui a donné son nom au peuple « pueblo », terme qui signifie « village » en espagnol. Aux alentours de 750, d’abord construits sur un seul niveau, les pièces d’habitations étaient organisées selon une ligne courbe, auxquelles venait s’ajouter les pièces de stockage le plus souvent à l’arrière,  autour d’une cour centrale ou l’on trouvait généralement la « pitroom », lieu de culte. Les villages pouvaient varier de 8 pièces d’habitation à plus de 200, le nombre d’espace de cérémonie augmentant avec le nombre d’habitation.

Même si les habitats étaient construits au niveau du sol, l’accès se faisait toujours à l’aide d’une échelle par une ouverture sur le toit. Cette ouverture servait également d’aération pour l’évacuation des fumées du foyer. Le toit était aussi un espace de vie à part entière, utilisé pour faire sécher des végétaux, travailler etc …

Maison en mur de pierre sèche et « unit type » village

Les habitats sont devenus de plus en plus pérennes, conçus à base de bloc de grès (850) selon une technique de maçonnerie en mur simple. A cette période, les villages sont plus condensés, souvent un petit nombre de pièces à vivre organisées autour d’une seule kiva, vraisemblablement habités par un seul clan. On parle alors de « unit type » village.

Maison a étage et abris sous roche

La technique de maçonnerie évolua ensuite en mur double qui leur permit de construire sur plusieurs étages. Les villages constitués alors de logements, de tours et de kivas étaient souvent construits sous les falaises naturelles de grés comme à Mesa Verde, ce sont les abris sous roche, « cliff dwellings ».

Les tours, connectées aux kivas par un tunnel souterrain devaient avoir un rôle cérémonial mais leur usage précis n’est pas connu. Certains bâtiments d’habitations pouvaient atteindre trois ou quatre niveaux. Les pièces de vies étaient toujours construite les unes  accolées aux autres selon un plan relativement orthogonal. Les espaces privés étaient situés côté falaise alors que les espace communs et lieux de cérémonie étaient tournés vers la vallée. Dans ces villages on pouvait généralement trouver une dizaine de kivas pour une cinquantaine de pièce à vivre, parfois plus. Les indiens chassaient sur le plateau et descendaient le long des falaises jusqu’à leur habitats en contrebas par des voies d’escalade ou des escaliers creusés dans la roche.

Les « Grandes maisons », organisation urbaine

Des villages du même type se sont aussi développés en fond de vallée comme à Chaco Canyon selon un plan beaucoup plus étendu, de forme parallélépipédique (Aztec Ruins) ou en demi-cercle (Pueblo Bonito, Chaco Canyon).

On parle alors de « Great House », grandes maisons, qui s’organisent à la manière de grands villages, toujours autour des multiples kivas et de plazzas. Ces lieux servaient vraisemblablement de place commune politique ou religieuse, pour les échanges ou les stockages de denrées. Les pièces s’enchaînaient les unes avec les autres, interconnectées en long et en large. On ne trouve donc pas de rue dans cet urbanisme ancestral. Les édifices de plusieurs étages étaient généralement construits en fond contre le mur d’enceinte, et le nombre d’étage était dégressif en allant vers la plazza et les espaces communs ouverts où se trouvaient les kivas, enterrées. Dans ces grandes maisons on retrouve une quantité de petites kivas disséminées entre les pièces du côté de la plazza principale et la plupart du temps une grande kiva principale, capable d’accueillir beaucoup plus de personnes , on les appelle les « grandes kiva » (great kiva).

L’orientation de ces « great house » était la plupart du temps liée à des connaissances astronomiques très précises car l’alignement de certains murs d’enceinte concorde parfaitement avec les solstices et équinoxes. La signification de cette orientation n’est pas réellement connue mais témoigne des connaissances scientifiques avancées de cette civilisation qui quitta les villages des falaises brusquement en 1300 sans que l’on puisse vraiment l’expliquer. Aujourd’hui le peuple des Hopis qui vit dans cette région dans des villages perchés sur des messas, est considéré comme les descendants les plus proches de cette civilisation pueblo.

C.