Projet San Isidro, Tlaxclo : Technique de construction en terre crue dans la campagne Mexicaine

Lors de notre passage dans le village de Tlaxco, au proyecto San Isidro , nous visitons le centre de formation où se déroulent les ateliers de construction.

Outre les briques d’adobe, que nous avons découvert pour la première fois au Nouveau Mexique et dont nous avons déjà parlé ici, de nombreuses techniques constructives à base de terre crue sont pratiquées ici. Techniques ancestrales redécouvertes et expérimentation, au Projet San Isidro la terre crue se travaille de multiples façons.Terre_Detail_deco

Techniques constructives pour les murs porteurs

La technique « Cob », dite Bauge en français

La technique du cob est une technique ancienne, pratiquée depuis des siècles en Europe et au Maghreb. Elle consiste à simplement modeler un mélange de terre argileuse, de sable et de fibre telle que la paille ou autres végétaux. Ces fibres végétales sont parfois remplacées du poil de bétail ou autre animal. Les fibres,  mélangées au mortier d’argile et de sable permettent de renforcer la résistance du matériau au cisaillement et à la traction.

Croquis_technique_constructive_COBLe mélange, très souple, est assemblé à la main, façonné de manière à obtenir la forme souhaitée. Au cours du séchage, le mur peut être régularisé à l’aide d’outils tranchants lorsqu’il est encore malléable. Cette technique permet de monter chaque jour une soixantaine de centimètre de hauteur, que l’on laisse sécher avant de continuer la couche suivante par-dessus le lendemain.

 Les murs en cob sont généralement conçus entre 30 et 50 cm d’épaisseur. Une fois l’ensemble du mur sec, il constitue un monolithe, qui assure à la fois une fonction porteuse et une bonne inertie thermique à l’édifice.

 L’usage d’un coffrage n’est pas nécessaire pour cette technique constructive qui s’apparente un peu à de la sculpture. Il existe cependant la possibilité de réaliser un mur en bauge à l’aide d’un coffrage bois, qui permet de conserver l’aplomb plus facilement et d’obtenir d’avantage de régularité sur la surface du mur.

 

 

La résistance d’un monolithe conçu avec la technique du cob, permet une grande liberté de création. Par exemple, nous avons découvert la technique simplissime d’un escalier de bois intégré au mur de cob. Avec un simple pieu enfoncé verticalement dans le mur à travers la marche en bois massif, le résultat obtenu est résolument contemporain.

Cette technique ouvre le champ à une grande créativité. Des formes organiques sont souvent réalisées avec cette technique sans coffrage. Aussi, cette mise en œuvre permet l’ajout de matériaux variés comme par exemple ici des tronçons de bois, une technique qui peut également être utilisée pour réaliser une dalle au sol.

Souvent, des bouteilles de verre sont intégrées dans les murs de cob, pour un rendu très graphique, permettant un apport de lumière à la façon d’un vitrail. La technique de mise en œuvre consiste à créer une maille métallique à laquelle sont fixées les bouteilles, selon le motif souhaité. Le remplissage en cob, façonné à la main, se fait autour des bouteilles, pour obtenir une cloison décorative, dans ce cas non porteuse.

La terre compactée : Pisé ou Tapia

 Croquis_technique_constructive_piseLa technique de la terre compactée, également pratiquée depuis des siècles dans différentes régions du globe, appelée technique du pisé (ou Tapia en espagnol) , consiste à compacter des couches de terre les unes sur les autres dans un coffrage de bois. La terre mise en œuvre n’est pas à l’état plastique, contrairement à la technique du Cob décrite ci-dessus, mais simplement assez humide pour que les grains du mélange puissent adhérer entre eux.

Chaque couche de 10 à 15 centimètres d’épaisseur est damée à l’aide d’outils spécifiques. Une fois la couche parfaitement compactée, une seconde couche est ajoutée sur la précédente, sans nécessité de séchage, afin de poursuivre le montage du mur.

Chaque banche, remplie de plusieurs couches, forme l’équivalent d’un gros bloc. Afin de renforcer la stabilité du mur, les blocs de pisés sont souvent intercalés les uns par rapport aux autres à la manière d’un appareillage de pierre.

Une fois les banches démontées, le mur obtenu forme un monolithe solide qui fonctionnera en mur porteur. Le plus souvent, ces murs sont montés sur des fondations et un soubassement en pierre.

San_Isidro_02Technique constructive pour cloisons non porteuses

Zacatlaniloli  ou Paja-Arcilla : Technique des herbes sèches et boue

Seulement utilisée pour diviser des espaces, cette technique, littéralement « paille et argile », consiste à rouler des brins de paille dans un mélange de boue argileuse et de les empiler les uns sur les autres dans un coffrage fixé  entre deux montant de bois, chacun espacés d’une soixantaine de centimètres. Cette technique permet d’obtenir une cloison non porteuse, qui pourra ensuite être enduite. Cette mise en œuvre ne nécessite pas de temps de séchage pour pouvoir monter la cloison sur toute sa hauteur.

Croquis_technique_constructive_zacatlaniloliCette technique peut être utilisée pour réaliser le remplissage d’une cloison verticale mais également pour un plancher horizontal. Une structure primaire en bois permet d’assurer la résistance du plancher et le remplissage se fait de manière latérale dans un coffrage horizontal. Une fois sec, le coffrage peut être retiré, et selon l’expérimentation du projet San Isidro, le plancher peut supporter le poids d’une personne et bénéficie également d’une excellente qualité acoustique.

Deux exemples de bâtiments en terre, d’hier à aujourd’hui

Les Cuexcomate, une construction ancestrale en terre et paille

Cuexcomate  étaient des greniers sacrés utilisés depuis la préhistoire mesoaméricaine comme des silos à grain. Leur base base évasée était construite selon la technique « Zacatlaniloli » (paille et argile ) sur un socle de pierre ou de briques. La toiture était réalisée en paille. Sur la partie inférieure de l’édifice, une petite ouverture permettait l’extraction de grains de maïs en y plaçant les sacs à remplir directement à l’intérieur. Un escalier de bois permettait de monter pour accéder à l’ouverture en toiture par laquelle on pouvait introduire le maïs à stocker.

Cuexcomate

Construction expérimentale sur le site de San Isidro

 Les quatre angles ont été conçus en pisé pour assurer la structure porteuse et le support de la toiture. Entre chaque angle, un mur a été réalisé en cob, intégrant des bouteilles de verre, sur une autre face de l’édifice, le remplissage est en ballot de paille. Le plancher sous la toiture est constitué d’une structure de bois, remplie avec la technique de Zacatlaniloli. Le mélange de paille et argile a été laissé tel quel, sans traitement pour la sous-face du débord de toiture à l’extérieur. Les deux frontons, abrités par le débord de toiture en  paille sont réalisés avec cette même technique de remplissage en paille et argile. Enfin, le sol a été réalisé en terre compactée et enduite.

Exemple_SanIsidro

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C.