Au fond d’un des Canyons les plus profonds du Monde…
Une fois remis du départ de nos amis, nous reprenons tranquillement notre rythme et retrouvons nos habitudes à deux. Nous quittons Arequipa en direction du Canyon del Colca, à quatre bonnes heures de route de là, réputé pour ses paysages grandioses. La route traverse de nouveau des plaines immenses, steppes arides peuplées de lamas et de vicuñas.
Une chaîne de volcans aux pointes enneigées défile à l’horizon. Nous passons un col à 4900 mètres d’altitude, point culminant du voyage à ce jour, avec le van… ! Un paysage désert et rocailleux nous entoure, des kerns de pierres érigés à perte de vue…
Au-delà de ses paysages hors du commun, Le Canyon del Colca est connu pour sa profondeur. Il serait le second canyon le plus profond du monde, après celui de Cotahuasi (plus profond de 150 mètres) situé un peu plus au Nord-Ouest de la même région. Nous avons lu qu’il était deux fois plus profond que le Grand Canyon aux Etats Unis.. ! En toute honnêteté, une fois sur place, les proportions complètement différentes des lieux ne permettent pas réellement de prendre conscience de cette comparaison…
Aux alentours du village de Chivay, la vallée se creuse peu à peu, donnant naissance au canyon. Les cultures en terrasses marquent le paysage et accentuent sa particularité. En descendant le long du Canyon, les gorges se font de plus en plus abruptes et profondes, jusqu’au village de Cabanaconde. D’ici part un sentier qui descend tout au fond du canyon, sur sa partie la plus abrupte. La vue est splendide, nous apercevons ici encore les cultures en terrasses sur les flancs d’en face et quelques villages isolés, desservis par une maigre piste de terre zigzaguant sur les pentes raides. Les cactus se dressent le long du sentier rocailleux.
Après deux heures de descente, nous atteignons le fond des gorges. La végétation y est entièrement différente, quasiment tropicale.
Des palmiers et des bananiers verdissent ce petit oasis, ou sont installés quelques hébergements pour les trekkeurs. Le temps d’un pique-nique à l’ombre et nous attaquons la remontée. Rude, cela nous prendra trois bonnes heures.
A la fin de la journée, les 2400 mètres de dénivelé positif et négatif cumulés nous ont assommés et nous nous endormons sans demander notre reste sur le parking désert du mirador de la Cruz del Condor. Nous passons la nuit sous un ciel constellé d’étoiles, face aux parois verticales du canyon. Demain matin à l’aube, des dizaines de ces mythiques charognards devraient survoler les lieux…
Seigneurs des Andes : Les condors
Les profondeurs du canyon et le soleil qui chauffe ses parois génèrent des courants d’air ascendants que les condors utilisent pour planer. A l’endroit précis de la « Cruz del Condor », toute une colonie a élu domicile dans les recoins des parois et selon la saison, chaque matin à l’heure où le soleil commence à chauffer la roche, ils survolent le canyon durant près de deux heures, offrant un spectacle inoubliable à tous les curieux venus se pointer dès l’aube. Nous qui avons dormi sur place, sommes les premiers au poste.
Ce sont les mâles qui présentent les caractéristiques du condor dans l’imaginaire collectif : Le plumage noir et la collerette blanche entourant un cou décharné. Les femelles, bien que tout aussi imposantes, ont plus des airs de rapace, avec un plumage plutôt marron et sans collerette.
Le spectacle est grandiose. Nous avions déjà aperçu un ou deux condors isolés au cours de nos randonnées Andines, mais aujourd’hui, ce sont des dizaines de ces célèbres vautours que nous voyons tournoyer sous nos yeux dans un manège sans fin. Durant près de 2 heures, nous observons ces rois des Andes, planer au-dessus du vide. A plusieurs reprises, ils passent à quelques mètres à peine, leurs ailes immenses étendues sur près de 2 mètres d’envergure…
Les coutumes traditionnelles du village de Cabanaconde, à l’ouest du Canyon
Le Canyon del Colca est marqué par les traditions locales qui continuent de se perpétuer. Dans le village de Cabanaconde, le jour de notre passage se préparer une célébration. Des hommes ont bâti sur la place centrale un grand château de bambous et de branches, haut de plusieurs mètres qui constitue le support de dizaines de pétards. Il sera enflammé le soir même en l’honneur de la « Virgen del Carmen ».
Nous croisons dans les ruelles des groupes d’hommes et de femmes vêtus de tenues traditionnelles, dansant et chantant en groupe dans tous le village. Les robes des femmes sont flamboyantes, brodées de motifs multicolores avec une infinie finesse. Qu’elles soient vêtues de leur robe traditionnelle ou non, les femmes portent ce chapeau caractéristique de cette partie du Canyon, de forme arrondie et repliée sur l’arrière, brodée de toutes les couleurs. Quelques dizaines de kilomètres plus à l’Est, les chapeaux sont d’une autre forme et les ornements sont tout autres.
Les Chullpas de Sillutsani : Monuments funéraires pré-Incas
Nous quittons le canyon del Colca et ses richesses pour poursuivre notre route vers l’Est en direction du Lac Titicaca et la frontière avec la Bolivie. Les paysages continuent de défiler, plaines désertiques, constructions en adobe isolées, lagunes d’altitude, volcans enneigés… La route est un spectacle.
En chemin, avant d’atteindre la ville de Puno, nous faisons une étape sur le site remarquable et trop peu connu de Sillutsani. Dans un cadre de vallons désolés et de lagunes à perte de vue, des ruines de tours funéraires pré-incas se dressent dans les champs : Les Chullpas.
Certaines constructions semblent avoir été reconstruites ou réutilisées par les Incas, avec l’assemblage des énormes pierres de taille qui rappelle ceux de la vallée sacrée, par la précision de la découpe et de l’assemblage des pierres.
Les Colla, un peuple guerrier occupèrent la région avant d’être intégré à l’empire Inca. Ils érigeaient ces tours comme sépulture pour les nobles défunts. La tour la plus imposante atteint 12 mètres de haut, avec une forme cylindrique, légèrement évasée et arrondie vers le haut. Une petite ouverture, toujours orientée vers l’est, permettant à un homme de se faufiler à plat ventre donnait accès au centre de la tour avant d’être scellé après les funérailles. Ils déposaient dans ces tours les restes de familles entières, accompagnés d’offrandes et d’objets pour leur voyage vers l’autre monde.
Ce site, désert dans le calme du petit matin, impressionne par sa force. Les lignes de ces monuments apparaissent étrangement contemporaines.
C.